En e-bike de Verbier à Zermatt, sans forcer, ou presque…

«Le « sans forcer », tu peux l’enlever», plaisante Sébastien, dit « Soleil », l’un des participants à la Petite Haute Route de la compagnie E-Alps en ce début juillet 2020. « Sans forcer » figurait dans un précédent article sur la « Haute Route » en e-bike entre Chamonix et Zermatt. Cette fois, nous avons rejoint Zermatt en VTT électrique au départ de Verbier, en quatre jours. Et avec la boucle autour de Zermatt le cinquième jour, nous avons près de 240 km et plus de 9000 m de dénivelé «dans les pattes». Certes avec une assistance électrique, mais le plus souvent sur des chemins de montagne, parfois escarpés et nécessitant de temps à autre un peu de «poussage». Les organisateurs promettent «d’épiques aventures alpines» et notre petit groupe de dix personnes en vivra quelques unes à raconter au coin du feu en hiver. Alors va pour enlever le « sans forcer »…

L’article est assez long, je vous mets donc une petite table des matières.


« Disclaimer »: Adrià, l’un des patrons de la jeune société E-Alps est arrivé en Suisse voilà bientôt 10 ans comme garçon au pair… dans ma famille. C’est dire que l’on se connaît plutôt bien. Vous pouvez bien évidemment penser que cela a pu influencer mon avis sur cette semaine à VTT électrique. Mais à voir l’enthousiasme des autres participants, je ne crois pas vraiment.


Jour 1: Verbier – La Sage par le Mont Rouge et Mandelon

Faute de cabines, en travaux, au départ du Châble, c’est dans les véhicules d’E-Alps que nous rejoignons la Croix-de-Coeur, point de départ de cette «Petite Haute Route». Après un bref topo et quelques consignes de sécurité, on s’élance dans le ludique «flow-trail» de La Tzoumaz. Premiers sourires et premières chutes, presque sans gravité puisque «Coquin» soupçonne une atteinte à une côte, qui le fera souffrir en silence durant le reste de la semaine. Mais pas de quoi l’arrêter en si bon chemin et nous poursuivons le périple sur les routes du Grand Raid par La Tzoumaz, avant de grimper jusqu’au bisse de Saxon pour rejoindre les hauts de Nendaz, puis Siviez par la route forestière.

Notre guide Amandine dans le flow trail de La Tzoumaz.

A Siviez, le télésiège de Combatzeline nous fait gagner quelque 500 m de dénivelé sans entamer la batterie, qui nous sera bien utile un peu plus tard pour l’ascension du Mont Rouge.

Là, après un début de journée passé avec le (déjà puissant) mode «Eco» du moteur Panasonic qui équipe mon Flyer Uproc 7, je dois user de toute la puissance de l’e-bike et tenter tant bien que mal d’équilibrer la machine pour ne pas me retrouver sur le dos en grimpant «droit dans le talus», l’option finalement la plus efficace après quelques tentatives de zigzag au pied de cette abrupte grimpette. Plus raisonnables, la plupart de mes compagnons de route profitent du mode «marche» de leur vélo pour surmonter l’obstacle.

Un joli petit sentier entre Combatzeline et le Mont Rouge.

De toute beauté et fidèle à sa réputation, la descente du Mont Rouge nous mène jusqu’à la route de la Dixence où l’équipe d’assistance nous attend avec un copieux pique-nique et les batteries de rechange. Le passage en forêt a toutefois fait une malheureuse victime. Touché à un œil après avoir chuté, Olivier nous quitte pour un contrôle à l’hôpital. Nous le retrouverons le soir à La Sage, mais il mettra un terme à son périple le lendemain matin pour procéder à des analyses complémentaires.

« Soleil » dans la descente du Mont Rouge.

Pour notre part, nous poursuivons sur le chemin du Grand Raid, avec la montée, puis la fameuse traversée de Mandelon, avant de rejoindre la tracé du Raid Evolénard vers le lac d’Arbey et plonger sur les Haudères par un superbe, encore un, petit sentier. Les organisateurs aiment rouler du «singletrail» et cela se remarque. Que du plaisir avant la courte (pour ceux qui n’ont pas épuisé leur batterie) montée finale vers La Sage.

La traversée de Mandelon, bien connue des participants du Grand Raid.

Au terme de cette première journée, le ton est donné. Les aventures promises sont bien là et il vaut mieux bénéficier d’une bonne condition physique de base, combinée à un certain niveau technique (aptitude à rouler sur du sentier souple, parfois avec une peu de «caillasse» et autres passages un peu gras), pour se faire plaisir sans trop subir, malgré l’assistance électrique. Cela reste du «vélo de montagne». Vivement demain!



Jour 2: La Sage – Hôtel Weisshorn par le col de Torrent

Pas de «flow-trail» pour se mettre en jambes aujourd’hui, ça part directement en bosse, juste derrière le charmant et sympathique hôtel de La Sage où nous avons passé la nuit. On grimpe jusqu’aux Mayens du Cotter, où les habitués du Raid Evolénard retrouveront la rude montée finale jusqu’à Bèplan. Un tronçon que je maudis en temps normal, agonisant au soleil, mais qui aujourd’hui, par un temps plus frais et avec le soutien du moteur électrique, me semble bien agréable…

Diego, le guide, et David dans la montée vers Bèplan.
Tout là haut, la croix du col de Torrent…

A Bèplan, la caillasse du col de Torrent se dresse devant nous, drapée d’une fine couche de neige tombée durant la nuit. Quelques névés nous empêchent parfois de rouler sur le chemin, encore très humide, et l’ascension n’a rien d’une sinécure. La solidarité s’est toutefois déjà bien installée dans le groupe et les plus à l’aise n’hésitent pas à prêter main-forte aux cyclistes un peu en difficulté. Comme depuis le premier jour, les guides, Amandine, Diego et Adrià, y vont aussi de leur coup de main et distillent les conseils avisés afin que chacun puisse se hisser aux 2900 mètres de ce col de Torrent et s’y offrir une pause bienvenue. Pas trop longue, car la météo ne s’améliore guère, avec même quelques flocons de neige par moments.

Avec ses 2900 m d’altitude, le col de Torrent se mérite…

Dans la descente, les névés encore bien présents nous offrent quelques moments de glissade dans la bonne humeur avant le décor «groenlandais» du lac des Autannes sur fond de glacier de Moiry. Spectaculaire et grandiose, tandis que le lac de Moiry a piètre allure avec un niveau d’eau famélique. La descente sur Grimentz, par le cassant final du Grand Raid achève de nous ouvrir l’appétit pour le toujours copieux pique-nique et l’ascension finale vers l’Hôtel Weisshorn.



Jour 3: Hôtel Weisshorn – Moosalp

Après les deux premières journées bien «tassées», l’étape vers Moosalp se présente presque comme un jour de repos. Le départ se fait en descente jusqu’à Sierre, toujours sur de magnifiques sentiers, à l’exception de quelques inévitables kilomètres (7,5 soyons précis) sur la route du Val d’Anniviers. Un tronçon qui constitue peut-être le seul point moins plaisant de ces cinq jours de VTT, mais difficile à éviter en e-bike, les variantes par le Meidpass ou le Forclettapass étant trop physiques et/ou techniques pour des cyclistes parfois mois aguerris que les habitués des «singles» valaisans.

Pascal talonné par Adrià dans la descente en direction de Fang.

Arrivée en plaine, la fidèle équipe d’assistance formée de Carina, son mari Hector et Giorgio nous embarque jusqu’au pique-nique à Ergisch. Requinqués, nous entamons la montée finale vers Moosalp, le plus souvent sur de petits sentiers où l’assistance électrique nous permet d’apprécier le «flow» en montée. Les raidards auront raison de certaines batteries, ce qui nous permettra d’expérimenter toute la puissance des moteurs au cours de quelques minutes de remorquage de nos amis restés en rade. Encore des moments qui créent des liens, bien renforcés par une petite mousse partagée dans le sauna ou le jacuzzi du chalet d’alpage qui nous accueille à Moosalp. Un lieu spectaculaire avec une vue imprenable sur le Bietschhorn, le «Roi du Valais».


Jour 4: Moosalp – Zermatt

Encore une journée relativement «tranquille» sur le papier, mais qui s’avère spectaculaire avec le premier long passage à flanc de coteau et ses tunnels dans la falaise avant une descente plutôt «souple» jusqu’à Embd. Un village qui défie Isérables pour le titre du plus pendu du canton… Depuis Embd, c’est le parcours de la Swiss-Epic 2014 qui se rappelle à mon bon souvenir avec la descente un peu plus engagée vers Kalpetran. Avec un peu moins de stress et de soucis mécaniques (aucune casse ni crevaison à signaler pour l’ensemble de participants à cette Petite Haute Route entre Verbier et Zermatt, petit «exploit» à signaler)…

Moosalp, un bel endroit pour commencer la journée.

Depuis les rives de la Matter Vispa, un magnifique sentier se déroule sous les roues de nos VTT électriques qui nous permettent encore une fois d’apprécier un peu de «uphill flow» sans trop d’efforts. Les kilomètres défilent jusqu’à Saint-Nicolas, puis Täsch et Zermatt où nous découvrons un Cervin «bouché». Mais nous avons évité la pluie et le Matterhorn s’offrira à notre regard un peu plus tard.



Jour 5: Zermatt – Täsch via Fluealp

Le dernier jour, c’est quartier libre pour les participants à cette Petite Haute Route, mais nous n’allons tout de même pas bouder le plaisir de (re)découvrir quelques petits sentiers locaux. Cap sur la région de Sunnegga, avec encore quelques souvenirs de la Swiss Epic 2014 jusqu’à Gant où nous bifurquons en direction de Fluealp pour un dernier petit café.

Adrià dans le majestueux paysage dominé par le Cervin.

Dans la descente, comme pour boucler la boucle du premier jour, nous empruntons le «flow trail» de Sunnegga, un peu plus «physique» que celui de la Tzoumaz, car moins pentu dans sa première partie. Vraiment sympa et très long. Nous ne boudons pas notre plaisir avant de remettre le cap sur Täsch où l’équipe d’assistance nous attend pour un dernier repas et point final à cette magnifique, et par moments épique, aventure à vélo sur les sentiers valaisans.



Les «Hautes Routes» de E-Alps, pour qui?

Sur son site internet, E-Alps précise les prérequis pour s’inscrire à l’une de ses randonnées de plusieurs jours. Expérience faite, il faut être assez à l’aise sur les sentiers, parfois caillouteux, parfois gras et pentus du canton. Les chemins soigneusement sélectionnés par les guides ne comportent pas de gros pièges et les guides préviennent des principales difficultés. Il n’y a par ailleurs aucun «déshonneur» à mettre pied à terre, ce qui peut être une bonne idée si l’on tient à voir Zermatt.

Une bonne condition physique vous garantira aussi des journées plus «confortables ». Malgré l’assistance électrique, le tracé compte quelques passages à pied où le poids de la machine complique bien la tâche. Et le cumul des dénivelés quotidiens se fait tout de même sentir à la longue.

Un encadrement de qualité

Pascal et sa fameuse machine à café manuelle.

Les guides de la compagnie E-Alps sont certifiés «Swiss Cycling » ou en passe de l’être. Dans tous les cas, ils connaissent le parcours comme leur poche et sont équipés pour parer à tous les imprévus. Ils n’ont certes pas de machine à café portable dans leur sac, mais pour cela nous avons pu compter sur Pascal «Coquin», par ailleurs notre spécialiste «Relive» entre Verbier et Zermatt.

Les guides vous donneront aussi quelques conseils utiles sur la technique de pilotage et sauront vous faire progresser durant ces quelques journées.

Rien n’est laissé au hasard et les participants sont aux petits soins du soir au matin. A part pédaler et s’appliquer, on ne s’occupe presque de rien et c’est bien agréable.

Le vélo de la randonnée: un impressionnant moteur Panasonic

Le Flyer Uproc 7

E-Alps m’a prêté un Flyer Uproc 7 équipé d’un moteur Panasonic GX Ultimate et d’une batterie de 750 Wh, garante d’une excellente autonomie (en faisant un peu attention je peux espérer plus de 2000m de dénivelé, malgré mes 78 kg). Un ensemble assez bluffant pour un «débutant» en e-bike. En mode «eco», le moteur fait bien plus que d’annuler le poids du vélo et offre une assistance suffisante pratiquement en toutes circonstances pour un utilisateur sportif. Si vous passez avec votre vélo «musculaire», vous passez en «eco», mais plus facilement. Les assistances supérieures serviront aux personnes un peu moins entraînées et permettront ainsi au groupe de rouler ensemble, sans trop d’attente pour les plus rapides.

Pour les plus entraînés, le mode «standard» du Panasonic servira surtout à s’économiser dans les raidards. Quant au mode «high», il est presque inutile et ne m’a servi que pour tracter l’ami «Coquin» en arrivant à Moosalp. Plus intéressant, le mode «auto» s’adapte à votre pédalage. Tranquille à plat? L’assistance est très faible. Besoin de quelques gros coups de pédale pour franchir un obstacle? Le moteur vous fournit l’assistance adaptée, comme lorsqu’il s’agit de passer quelques épingles en montée sans vous propulser dans le talus comme le ferait la machine en mode «standard» ou «high».