Le 22 octobre, nous élirons le nouveau Parlement fédéral. Le thème de la mobilité est le plus souvent abordé par la lorgnette «auto contre transports publics» et le vélo, pourtant incroyablement efficace pour contribuer à régler de nombreux problèmes (congestion, pollution, santé publique…) n’est que rarement abordé par les médias du pays. En tant que personne circulant à vélo, il n’en reste pas moins intéressant de savoir qui défend vraiment nos intérêts dans ce domaine. Pro Velo et Velojournal l’ont fait dans leur dernière édition. Et les constats ne sont, malheureusement, guère surprenants.
«Depuis l’adoption de la loi sur la protection du climat en juin, la Suisse a des objectifs climatiques clairs. L’objectif net zéro d’ici 2050 s’applique également au secteur des transports», rappelle Velojournal. Pour réduire les émissions de CO2, le vélo a un rôle important à jouer, d’autant plus qu’avec la loi sur les voies cyclables en vigueur depuis janvier 2023, les conditions-cadres sont en place.
Depuis le début de l’année, on n’a toutefois pas vu venir grand chose pour la mise en œuvre de cette loi et les votes concernant le confort et la sécurité des personnes à vélo indiquent qu’il serait bienvenu de renouveler quelque peu la représentation politique à Berne.
PRO VELO a ainsi examiné les trois votes les plus importants de ces quatre dernières années au Conseil national en matière de politique cyclable:
- la nouvelle loi fédérale sur les voies cyclables;
- la proposition d’interdiction de dépasser les cyclistes dans les giratoires, où ont lieu la plupart des accidents avec des cyclistes alors que ceux-ci ne sont responsables de l’accident qu’une fois sur dix;
- la proposition de fixer dans la loi d’une distance minimale de 1,5 mètre lors du dépassement des cyclistes, comme c’est déjà le cas dans de nombreux pays, dont l’Espagne où cela fonctionne très bien.
La loi sur les pistes cyclables a bénéficié d’un large soutien de la part de presque tous les partis, l’UDC étant le seul groupe à rejeter le projet en bloc et à s’opposer à l’extension de l’infrastructure cyclable dans toute la Suisse, malgré le mandat du peuple. Bref, l’UDC n’aime pas les personnes à vélo et estime qu’il ne faut rien faire pour elles. La «sécurité» dont parle à tout bout de champ ce parti ne s’applique, semble-t-il, pas aux gens qui choisissent un mode de transport respectueux de l’environnement et des deniers publics, tout en apportant de nombreux bénéfices, notamment en termes de santé publique (avec des économies également dans ce domaine) à l’ensemble de la société.
Toujours au sujet de cette loi, quelques abstentions ont également été enregistrées au sein du groupe PLR. «Tous les autres partis ont voté en bloc pour la nouvelle loi. Ils ont ainsi soutenu l’objectif de créer d’ici 20 ans des réseaux cyclables cantonaux continus et sûrs.»
La sécurité des personnes à vélo peut attendre
Les fronts étaient moins marqués s’agissant de la distance latérale minimale lors du dépassement, souhaitée à 1,5 mètre, distance notamment conseillée par la police. Les Verts et le PS ont soutenu en bloc cette proposition, comme une courte majorité des Verts libéraux. Le camp bourgeois a toutefois rejeté cette proposition, pourtant frappée au coin du bon sens.
Quant à l’interdiction de dépasser dans les giratoires, les Verts, le PS et les Verts libéraux ont appuyé en bloc cette proposition, sans succès face à l’opposition (à quelques exceptions près) du Centre, du PLR et de l’UDC pour qui il semble très important de pouvoir doubler dans les carrefours.
La politique politicienne dans toute sa splendeur
«Les chances qu’une intervention sur le vélo déposée par le PS ou les Verts soit rejetée au Parlement sont bien plus grandes que si elle venait du PLR et du centre», déplore Matthias Aebischer, président de Pro Velo et conseiller national PS.
Le Conseil fédéral n’est d’ailleurs pas en reste, jugeant par exemple «trop compliqué» de mesurer la distance latérale de dépassement.
La réglementation actuelle, qui oblige la personne qui dépasse à prêter une attention particulière à celle qu’elle veut dépasser, est suffisante.
Le Conseil fédéral suisse
C’est d’ailleurs bien pour cela qu’un accident de vélo sur dix est dû à une distance de dépassement trop faible.
le Conseil fédéral refuse aussi que les systèmes d’assistance d’angle mort soient obligatoires pour les bus, les camions et les semi-remorques – et ce pour les véhicules immatriculés à partir de 2024. Un autocollant fera l’affaire (non)…
De plus, la fiabilité des dispositifs d’équipement a posteriori autorisés soulève des doutes. Lors d’un test réalisé par le club automobile allemand ADAC, seuls deux instruments sur neuf ont obtenu de bons résultats et quatre se sont même révélés insuffisants.
Le Conseil fédéral suisse
Du coup, on pourrait demander d’installer les deux instruments qui ont de bons résultats, non?
Outre l’argent, souvent évoqué pour ne rien faire, alors que les infrastructures piétonnes et cyclables sont les moins onéreuses à réaliser, Velojournal évoque «le manque de volonté politique et le manque de personnel formé dans les administrations» comme obstacles à un changement souhaitable, et rapidement, en faveur du vélo.
Chaque voix compte
Pour Velojournal, «celles et ceux qui souhaitent renforcer les forces fiables en matière de politique cycliste devraient donc voter pour les Verts, le PS ou les candidat·e·s des Verts libéraux qui ont des affinités avec le vélo. Ceux qui veulent voter pour d’autres partis, mais qui souhaitent être bien représentés en tant que cyclistes, devraient examiner la position des candidats sur les questions cyclables et ne voter que pour ceux qui sont assez courageux pour s’écarter de la position de leur propre parti. Car il en va de la promotion du vélo comme d’une chorale: il faut des solistes, mais toutes les voix constituent en fin de compte le concert.»
Pour éviter la cacophonie actuelle ou l’annulation du concert, vous savez ce qu’il vous reste à faire.