Le Conseil fédéral a récemment répondu à la motion « Même traitement pour tous les conducteurs en cas de violation des règles de la circulation » du conseiller national PLR Hans-Peter Portmann. Et il l’a heureusement incité à revenir à la raison.
Hans-Peter Portmann demandait ce qui suit: « Le Conseil fédéral est chargé de faire modifier, là où cela s’avère nécessaire, le code pénal et en particulier la loi sur la circulation routière, de sorte que tous les conducteurs de véhicules soient soumis, en cas de comportement fautif, aux mêmes procédures et aux mêmes sanctions (peines, amendes, etc.) en termes de durée ou de montant et d’efficacité. A cet égard, les sanctions doivent porter sur toutes les autorisations de circuler des usagers fautifs, indépendamment du véhicule utilisé. De plus, le Conseil fédéral est chargé de prendre des mesures pour que les cantons et les communes, en cas de non-respect des règles de la circulation, sanctionnent les conducteurs de véhicules non motorisés aussi sévèrement que les conducteurs de véhicules motorisés. »
En clair: merci de punir les cyclistes de la même manière que les automobilistes.
Le motionnaire relève encore que « la mise en danger des usagers de la route, et en particulier des piétons, a drastiquement augmenté en raison du comportement fautif des conducteurs de véhicules non motorisés. »
Pas d’augmentation des accidents
Pour M. Portmann la mise en danger des usagers de la route a donc augmenté, ce qui reste une opinion fondée on ne sait sur quelle base. Pour ce qui est des chiffres et des accidents réellement constatés, le BPA relève dans son « Rapport Sinus 2016 » que « le nombre de dommages corporels graves subis par les piétons a connu quelques fluctuations durant la dernière décennie. Les chiffres des accidents ont néanmoins tendance à stagner sur l’ensemble de la période. Seuls les moins de 18 ans affichent une évolution positive durable (–30%). »
Selon les chiffres du BPA, il y a eu 58 piétons tués en 2015, ce qui est évidemment trop. Mais il est peu probable qu’ils l’aient tous été par des cyclistes, cela se saurait et aurait fait les grands titres de la presse. On sait surtout que les automobilistes sont le plus souvent en cause. Lors d’accidents graves impliquant des piétons, ces derniers sont « seuls responsables » dans seulement 22% des cas.
Et pour parler des cyclistes, je souligne un chiffre du Rapport Sinus 2016: lors d’accidents graves impliquant un cycliste dans les carrefours giratoire, le cycliste est principalement une victime non fautive dans 95% des cas. Mais il est bien sûr urgent de légiférer contre les cyclistes.
«La mise en danger potentielle est nettement plus faible avec un cycle qu’avec une voiture de tourisme »
Heureusement le Conseil fédéral est plus raisonnable que ces chantres de la liberté dans d’autres domaines, et il répond ceci: « Les autorités cantonales et communales chargées de l’exécution ont d’ores et déjà la possibilité de sanctionner le comportement fautif des conducteurs comme il se doit. Les contraventions peuvent être réprimées selon la procédure simplifiée relative aux amendes d’ordre. Le montant de l’amende se fonde notamment sur la mise en danger abstraite potentielle. Malgré la schématisation de la procédure relative aux amendes d’ordre, il tient ainsi compte du principe selon lequel la peine doit être fonction de la culpabilité, laquelle est à son tour déterminée par la gravité de la mise en danger du bien juridique. Or la mise en danger potentielle est nettement plus faible avec un cycle qu’avec une voiture de tourisme. (…)
L’auteur de la motion exige en outre que la sanction soit identique, quel que soit le véhicule utilisé. Par conséquent, un cycliste qui roule sur le trottoir avec son vélo devrait payer la même amende que s’il conduisant une voiture et, dans le pire des cas, il devrait même pouvoir être “sanctionné” par un retrait du permis de conduire. Voilà qui va trop loin aux yeux du Conseil fédéral. Pour ces motifs, il estime que les modifications législatives demandées sont disproportionnées. »
Alors, à tous les signataires de la motion (dont malheureusement trois Valaisans): plutôt de punir des catégories d’usagers déjà parmi les plus vulnérables, merci de travailler à améliorer vraiment la sécurité des piétons et des cyclistes en leur proposant des infrastructures adaptées ne les obligeant pas à frayer avec des monstres de tôle qui sont, eux (enfin ceux qui les conduisent tant bien que mal) les vrais dangers sur nos routes et dans nos rues.
Pour mes archives, les cosignataires valaisans de la motion
Marchand-Balet Géraldine, Nantermod Philippe, Ruppen Franz.
Les 69 autres sur le site du parlement.
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