Cette année, en rentrant de Catalogne, je me suis retenu. Je ne me suis pas énervé dès les premiers jours avec certains automobilistes qui faisaient n’importe quoi. Mais ce mercredi soir, après un dépassement rageur qui m’a craché des effluves de diesel au visage et un coup de klaxon tout aussi agressif un peu plus loin, je me suis amusé à comparer certaines situations sur nos routes avec d’autres vécues en Catalogne.
En Catalogne, les automobilistes (les locaux, pas les touristes…) attendent toujours tranquillement derrières les personnes à vélo que la vue et la route soient bien dégagées pour entreprendre un dépassement, sans faire vrombir leur moteur ou crisser les pneus pour manifester leur mauvaise humeur. Chez nous, c’est l’exception: 1-0.
Lorsqu’ils entreprennent ledit dépassement, c’est bien au large, le plus souvent en se déportant entièrement sur l’autre voie de circulation. Chez nous, on se fait encore souvent frôler, surtout lorsque la route est dotée d’une bande cyclable, certains pensant que la peinture les dispense de respecter une distance de sécurité. Encore un point pour l’Espagne: 2-0.
Ce dernier point est d’autant mieux respecté en Espagne que la loi oblige les automobilistes à respecter une distance latérale minimale de 1,5 m lors du dépassement d’un cycliste et de nombreux panneaux viennent le leur rappeler sur les routes très fréquentées par les personnes à vélo. En Suisse, au pays des instruments de précision, nos autorités, Conseil fédéral en tête, estiment que ce serait «trop compliqué». Argument non recevable: 3-0.
En Espagne, les automobilistes qui klaxonnent les cyclistes le font pour les encourager dans les montées de cols. Situation vécue avec un groupe de jeunes. Chez nous c’est pour qu’ils se poussent là où il n’y a pas de place. Ou juste parce que la présence de personnes plus lentes sur la route les énerve. Pas cool: 4-0.
En Catalogne, il n’est pas rare de voir un automobiliste céder sa priorité à un cycliste afin qu’il puisse garder son élan. Jamais vécu cela dans nos contrées: 5-0.
En Espagne, les routes de campagne ne sont pas interdites aux cyclistes, contrairement à ce qui est en vigueur dans certaines communes valaisannes, dont la mienne, Fully: 6-0.
En Espagne, lorsque votre route non goudronnée traverse un champ où les travailleurs doivent s’interrompre pour vous laisser passer, ils ne vous gratifient pas d’un «faites chier avec vos vélos, il y en a qui bossent». Ils vous disent bonjour, complimentent madame d’un «¡Hola pepita!» et s’excusent de vous avoir fait poser le pied. Celle-là vaut presque deux points, mais le score est déjà assez sévère et on ne va pas exagérer: 7-0.
Et nous parlons bien ici de la pratique sportive ou de randonnée et pas du vélo utilitaire au quotidien. Cette pratique même où le Valais tente de se profiler comme une destination de premier ordre pour attirer les touristes cyclistes. Il y a encore du boulot.
Au final c’est un peu comme au Concours Eurovision de la chanson: Switzerland, zero point.