Réseaux sociaux: le peloton «gazouille» toujours plus fort

Des réseaux comme Facebook et Twitter permettent aux cyclistes de livrer les informations de leur choix au public, tout en augmentant leur capital-sympathie auprès de leurs fans. L’art de la communication «sociale» s’invite dans le peloton, dans la roue de Lance Armstrong et des équipes anglo-saxonnes.

La page Facebook de Lance Armstrong. Des infos "de première main" pour les fans.

«Cela va faire du bien de rouler quelques heures sur mes vieilles routes d’entraînement. Je suis en train de repérer le long contre-la-montre pour le Giro. Le paysage est magnifique à Cinque Terre». Des confidences de Lance Armstrong publiées dans l’Équipe au printemps 2009, à quelques semaines du départ du Giro du centenaire. Sympa d’avoir des nouvelles du champion, sauf que les habitués des réseaux sociaux étaient déjà au courant… Les informations avaient été confiées non à un journaliste particulièrement apprécié, mais bien à des milliers de personnes via le réseau Twitter. Des « confidences » librement partagées par le cycliste avant d’être reprises par le journal français. Pour mémoire, c’est aussi sur Twitter qu’est née la polémique après la défaillance d’Alberto Contador sur le Paris-Nice 2009. « Un talent incroyable, mais encore beaucoup à apprendre », avait sobrement commenté Armstrong sur son compte. La boule était lancée…

Les journalistes, jadis le seul moyen pour le sportif de toucher ses fans, sont aujourd’hui court-circuités par les athlètes. Dans une démarche spontanée pour certains – rien de plus facile que de livrer quelques réflexions depuis son téléphone portable -, ou nettement plus réfléchie pour d’autres. Avec Twitter, Facebook et son site internet, Lance Armstrong et ses conseillers ont établi un véritable système de communication autour du sportif et de sa fondation, Livestrong. Le cycliste étasunien est aujourd’hui bien davantage qu’un sportif, une véritable marque sur deux roues.

Lance Armstrong le pionnier

Lance Armstrong a été l’un des premiers à « gazouiller » (le nom de Twitter vient des tweets, les gazouillis des oiseaux en anglais) sur la toile, contant ses menues aventures en 140 caractères. D’autres cyclistes ont suivi, mais le compte @lancearmstrong reste le plus populaire de tous. Au 1er mars dernier, les « tweets » du champion américain étaient suivis par près de 2,5 millions de personnes. Prévenant, il a même ouvert un compte pour son fils Max, né en… 2009.

Le Texan ne se limite évidemment pas à Twitter et ses 140 caractères maximum. Sur le plus populaire réseau Facebook, sa page officielle compte plus d’un million de fans. Le Texan y publie des informations sur son quotidien de coureur et sa vie familiale, mais aussi des vidéos d’entraînement et des commentaires d’après-course. Largement de quoi se passer des journaux pour les infos immédiates, surtout depuis que l’ensemble du peloton y va de son couplet régulier. Avec tout de même une présence marquée des équipes anglo-saxonnes, les seules ou presque à proposer des liens vers leur page Facebook, Twitter ou YouTube directement depuis le site internet officiel.

Maîtriser sa communication

L’année 2009 fut celle de l’émergence des réseaux sociaux dans le peloton cycliste. L’an 2010 pourrait bien être celui de leur usage massif et systématique. Tous les athlètes ou presque disposent d’un site internet. Les réseaux comme Twitter, Facebook, voire même YouTube pour les vidéos, sont un bon moyen de drainer le trafic des internautes vers son site personnel ou celui de l’équipe. Histoire de maîtriser ce qui est dit et ce qui doit être lu…

Sur Twitter, Robbie Hunter se demande pourquoi le cyclisme est si populaire en Belgique, un pays où il pleut autant.

Dans la nature, le gazouillis des oiseaux annonce le retour du printemps. Sur l’Internet, les gazouillis des cyclistes pro annoncent le retour des compétitions. Météo exécrable en Belgique pour la Kuurne-Bruxelles-Kuurne (KBK) ou incident et course tronquée à Lugano le 28 février, les commentaires ne se font pas attendre. «Crevaison en début de course. Dû attendre les attardés pour prendre une roue = jamais revu la tête. Peut-être une bonne chose. la météo était horrible», témoigne George Hincapie après la KBK. De son côté, Robbie Hunter s’interroge: «Pourquoi le cyclisme est-il si populaire en Belgique avec une météo si mauvaise? Étrange. C’est tellement plus facile de faire du vélo quand il fait beau». Plus sérieusement, le même dimanche 28 février, à Lugano, c’est le champion du monde Cadel Evans qui déplore une «journée confuse au GP de Lugano. Les échappés sont arrêtés par une voiture sur le parcours. Course annulée, mais 40 coureurs repartent».

Proximité avec les fans

Les amateurs de cyclisme friands d’anecdotes « de première main » sont ainsi toujours plus nombreux à trouver leur bonheur sur les réseaux sociaux. D’autant plus que sur des sites comme Facebook, et Twitter dans une moindre mesure, chacun peut laisser son commentaire et ainsi participer à la discussion. Le sportif construit son image tout en valorisant ses fans. Des news, des conseils partagés, des « confidences » pour développer la proximité et les commentaires des internautes pour mieux cerner les attentes. Tout bénéfice.

La communication sportive se situe peut-être à un tournant avec l’ampleur prise par ces réseaux. Leur adoption désormais massive par l’ensemble de la population permet aux athlètes de court-circuiter les canaux habituels. Pendant le Giro 2009, Armstrong, en froid avec la presse italienne, ne s’était plus exprimé que par l’intermédiaire de son compte Twitter, distillant alors en 140 caractères ses impressions sur sa forme, la course, les étapes. Bien vu: les fans restent informés et le Texan maître de ses paroles et écrits…

Demain, tous sur Twitter ou Facebook?

Et demain? Tous sur Twitter ou Facebook? Probablement, même si le système ne fonctionne que dans la mesure où les publications gardent leur aspect spontané. Sinon, le lecteur pourrait bien se lasser aussi. Untel parle de son rhume qui l’empêche de s’entraîner correctement. Un autre de sa dernière sortie au cinéma, un troisième de la météo à Varese… Sympa. Mais le danger de la récupération commerciale de ces gazouillis et autres statuts Facebook est bien présent. Aujourd’hui on demande déjà aux sportifs d’arborer la bonne casquette et les bonnes lunettes de soleil lors des interviews. De là à ce que les sponsors exigent quelques « tweets » par semaine pour dire du bien des chaussures ou du dernier cadre carbone, il n’y a que la largeur d’un boyau.

L'édition du printemps 2010 de Vélo Romand.

Cet article a été publié dans l’édition du printemps 2010 du magazine Vélo Romand. Sommaire complet sur la page du magazine.

Twitter, fb… Comment ça marche?

Vous voulez suivre les dernières infos distillées par votre coureur favori? Rien de plus simple. Il suffit d’ouvrir un compte sur  www.twitter.com, puis de s’abonner aux publications des gens qui vous intéressent. Une petite recherche sur le site permet de trouver quelques cyclistes, puis, de fil en aiguille, on en découvre d’autres. Les sites internet des équipes, surtout les Anglo-saxonnes comme Radioshack, Garmin, Sky, mais aussi BMC disposent de liens directs vers des flux Twitter ou une page Facebook. Pour ce dernier site, de nombreux coureurs disposent d’une «Fan page». Nul besoin d’être «ami» avec son auteur, n’importe qui peut s’abonner à ce type de contenu.

Certaines équipes vont encore un peu plus loin avec des vidéos partagées sur YouTube et Vimeo, ainsi que des images sur Flick’r ou Picasa.

La plupart de ces réseaux sociaux, ou de partage, sont accessibles depuis un ordinateur, mais aussi avec un téléphone portable. Et c’est bien ce dernier outil qui a permis la popularisation de ces réseaux sociaux. Envoyer une info avec une photo sur Twitter depuis son téléphone est aujourd’hui aussi simple que d’expédier un SMS. À la différence près que, si l’on s’appelle Lance Armstrong, on atteint plus de 2 millions de personnes. Instantanément.

Quelques liens utiles

Les Romands encore frileux

Les coureurs pros romands disposent tous de leur site internet, mais n’ont pas encore vraiment franchi le pas des réseaux sociaux. «J’ai plutôt investi dans un nouveau site internet, que j’alimente depuis mon téléphone», explique Steve Morabito. «Et franchement, publier des news sur Facebook, ça me coûte. C’est aussi à double tranchant. Si on met des news, les gens s’habituent à en recevoir et en redemandent… L’équipe BMC nous a aussi présenté les outils disponibles, tout en nous expliquant les choses à éviter, comme d’arriver après la course et de dire que le vélo, c’est de la m…. Mais personnellement, je préfère encore voir mes amis en vrai.»

Un autre Valaisan, Johann Tschopp, n’est pas non plus forcément branché sur les réseaux sociaux. «Un ami a créé mon site internet, ainsi qu’une «fan page» sur Facebook. Mais c’est lui qui se charge de l’alimenter. Cela prend du temps et ce n’est pas forcément mon truc de rester devant l’ordinateur, même si le site internet reste intéressant pour permettre aux gens de suivre nos activités.»