Le TCS en veut aussi aux piétons

Le TCS n’est pas vraiment l’ami des cyclistes, malgré ce qu’il essaie de nous faire croire. Et les piétons ne sont pas mieux lotis si j’en crois le dernier numéro de Touring, le magazine du club d’automobilistes.

Les illustrations toujours subtiles du TCS. Après les cyclistes, les piétons.
Les illustrations toujours subtiles du TCS. Après les cyclistes, les piétons.

Attention, ça attaque fort d’entrée: “Nombre (notez la généralisation) de piétons se comportent de manière inadaptée. […] Alors que les plus jeunes jouent aux abords de la route, d’autres écoutent de la musique ou pianotent sur leur téléphone portable en marchant. Autant de comportements inappropriés.

Je ne suis pas certain que de jouer aux abords de la route soit pire que de jouer SUR la route, mais passons. Ce sont donc des comportements “inappropriés” pour le TCS, soit-disant pour la propre sécurité des piétons. La vraie raison, c’est qu’ils obligent ainsi les automobilistes à être attentifs et à avancer moins vite qu’ils ne le souhaiteraient peut-être. La bagnole doit pouvoir rouler sans perturbation. On voit déjà venir l’argument « c’est pas de ma faute si j’ai écrasé ce brave monsieur, il écoutait de la musique ».

L’article relève très justement que “l’inattention est l’une des principales causes d’accidents graves en Suisse” et que les piétons figurent parmi les usagers les plus vulnérables de l’espace public. « D’après le rapport Sinus du bureau de prévention des accidents (rapport 2013 ndlr), près de 1100 personnes, tous usagers confondus, ont subi des dommages corporels graves dus à l’inattention en 2013. Parmi eux, 190 piétons. De plus, 21 personnes se déplaçant à pied sont décédées. Des chiffres qui invitent à la réflexion. » 

En effet, réfléchissons.

L’article souligne que 3 piétons sur 10 affirment écouter de temps en temps de la musique en marchant. Donc 70% ne le font pas, et encore pas tout le temps pour les 30% restants. Deux piétons sur dix traversent “parfois” sans regarder (et rien n’indique qu’il s’agisse de ceux qui écoutent de la musique). Donc 80% des piétons regardent avant de traverser. La rédactrice insiste aussi sur les jeunes (qui écoutent davantage la musique) et les enfants “souvent dépassés dans le trafic et (qui ) ne se rendent pas compte des dangers. Il incombe aux parents de les sensibiliser à la circulation routière.” Rappel: la bagnole doit pouvoir avancer sans perturbation possible.

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Les « activités distractives » des piétons. Ou comment faire dire tout et son inverse à des chiffres pour détourner… l’attention des vrais problèmes.

Bref, je peine à saisir l’intensité du problème. D’autant plus que, si j’en crois le même rapport Sinus du BPA, dans sa livrée 2014 « Le risque pour un piéton d’être tué dans un accident de la route en Suisse augmente avec l’âge: comparé à celui des enfants et des jeunes jusqu’à 17 ans, il est multiplié par 1,5 pour les adultes jusqu’à 44 ans, par 3 pour les 45–64 ans, et par près de 8 pour les plus de 64 ans 2 . En moyenne, 70 % des piétons tués ont 65 ans ou plus. »

Touring cible donc les jeunes alors que les personnes les plus en danger sont les seniors. Mais pas facile de s’en prendre à eux, qui n’écoutent pas de musique, ni ne téléphonent en marchant. Pas plus qu’ils ne jouent au bord des routes…

L’automobiliste responsable neuf fois sur dix

Le magazine “oublie” aussi le principal du rapport “Sinus” qu’il cite par ailleurs: lors des accidents recensés sur les passages piétons, l’automobiliste est en tort neuf fois sur dix: “Pour les accidents avec des véhicules motorisés à quatre roues, la cause principale est attribuée aux conducteurs dans 90% des cas.

Alors moi, ça me plairait bien que Touring mette un dixième de son énergie qu’il consacre à “éduqer” piétons et cyclistes pour rappeler aux automobilistes que les vrais dangers mortels sur la route, ce sont eux.

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